LA PSYCHOLOGIE CLINIQUE
C'est le suisse Edouard Claparède qui le premier a utilisé le terme de psychologie clinique pour décrire l'action de « transporter les ressources de la psychologie expérimentale au lit du malade ». C'est ensuite Daniel Lagache qui en a donné la première définition en 1949. Selon lui, la psychologie clinique est une science de la conduite humaine, fondée principalement sur l'observation et l'analyse approfondie des cas individuels aussi bien normaux que pathologiques pouvant s'étendre à celle des groupes. Elle est issue des apports de la psychanalyse qui lui a donné un de ses modèles de compréhension du fonctionnement psychique en termes d'instances, de topiques et de ce qui s'y joue (transfert, identification, projection, clivage de l'objet etc ... ) La visée de la clinique est la compréhension des forces en présence (pulsions et défenses) de leur signification inconsciente, des symptômes, des traits de caractères ou des comportements qui ont provoqué la consultation d'un psychologue. Deux méthodes, non exclusives, peuvent être utilisées : l'entretien clinique ou l'examen psychologique avec les tests. Le courant clinique en psychologie s'est initié à la suite d'une opposition à la pensée d'Aude Bonnaric, qui ne voyait dans la psychologie aucune possibilité de scientificité et pour qui l'explication des faits psychiques devait être cherchée soit du côté du biologique, soit du côté de la sociologie. John Stuart Mill fût le premier à défendre une véritable scientificité de la psychologie, mais il ne pût répondre que de façon embarrassée à Auguste Comte, manquant d'une méthode objective. Pierre Janet fût le premier à mettre en place une psychologie scientifique reposant sur une méthode d'analyse psychologique. Sigmund Freud suivra rapidement, ce qui donnera d'ailleurs des débats de priorités entre ces auteurs, avec chacun leur conception personnelle de l'appareil psychique. Plus tard, la contribution d'Henri Wallon, d'André Rey , de Jean Piaget, mais également de Kurt Lewin seront également d'importance pour permettre le développement d'une consistance de la psychologie clinique. En effet, tous ces auteurs ont comme points communs : La psychologie clinique, telle qu'elle se pratique, est attachée aux noms de d'Edouard Claparède, Daniel Lagache et Juliette Favez-Boutonnier, tous trois médecins, psychologues et philosophes, les deux derniers étant aussi psychanalystes. Ce quadruple ancrage lui donne son caractère particulier, fait d'une tension entre un pôle « objectif » représenté par l'utilisation de tests, et un pôle « subjectif » représenté par la situation d'examen et/ou d'entretien. Dans les deux cas, il s'agit d'une situation clinique, c'est-à-dire de la saisie singulière d'un individu « en situation » par un autre individu. Ce trépied peut se détailler ainsi:
L'OBJET DE LA CLINIQUE Le terme clinique est hérité de la médecine : si le psychologue est dit clinicien, c'est autant parce qu'il sort de son laboratoire de recherche pour rencontrer l'autre dans des situations « naturelles » que parce qu'il rencontre des personnes présentant des troubles ou des difficultés psychiques. Est donc clinicien le psychologue qui rencontre des personnes en autant d'individus singuliers, contrairement à la situation de laboratoire où ce ne sont pas des personnes qui sont rencontrées mais des variables qui sont manipulées. " ... envisager la conduite dans sa perspective propre, relever aussi fidèlement que possible les manières d'être et de réagir d'un être humain concret, complet, aux prises avec une situation, chercher à en établir le sens, la structure et la genèse, déceler les conflits qui la motivent et les démarches qui tendent à résoudre ces conflits, tel est en résumé le programme de la psychologie clinique"(D. Lagache) Il y a eu, au cours de l'histoire de la discipline clinique, un déplacement de son centre de gravité. La psychanalyse, qui était à ses frontières comme une « ultra-clinique » est petit à petit devenu son noyau dur, la confrontant au risque de n'être plus que le fantôme de celle-ci. Les choses sont aujourd'hui plus diversifiées. La psychanalyse est redevenue un modèle théorique, parmi d'autres, de la psychologie clinique. La psychanalyse avait été appelée à cette place du fait d'une série d'oppositions qui avaient été vécues comme des impasses : Opposition des points de vue (naturaliste vs humaniste), des champs (psychologie expérimentale vs médecine) et des pôles de la personnalité (le comportement vs la sphère affective). Cela a eu pour effet immédiat un enrichissement de la discipline, tant du point de vue de la technique (l'entretien, l'examen psychologique) que du point de vue doctrinal. L'unité de la psychologie qu'appelait de ses vœux Daniel Lagache ne peut donc être obtenue qu'en maintenant un équilibre entre des forces parfois opposées. Ce que l'on appelle une personnalité, n'est-ce pas non plus un équilibre entre des forces internes et externes ? Ce que cette personnalité peut avoir d'unique, de singulier, d'irréductible à l'autre, sera exploré aussi complètement que possible à l'aide d'entretiens ou de tests. Il ne s'agit pas d'exclure la subjectivité, ni même de la réduire, mais de la mettre au cœur du projet de la psychologie clinique, d'en faire son objet d'étude : un sujet, le psychologue, tente de comprendre un autre sujet, le consultant, et il le fait avec les techniques et les méthodes de sa discipline, mais également avec ce qu'il est lui même comme sujet. C'est là, au cœur de la subjectivité, de l'individuel, que la psychologie clinique rencontre l'universel, et partant, fonde sa scientificité. D. Lagache définit l'objet de la clinique comme « l'étude de la conduite humaine individuelle et de ses conditions (hérédité, maturation, conditions psychologiques et pathologiques, histoire de la vie) en un mot l'étude de la personne totale en situation". (D. Lagache). Elle utilise comme technique l'entretien et l'examen psychologique ( avec les tests ). L'individu pris dans sa concrétude, tel est l'objet de la psychologie clinique : « La psychologie clinique est caractérisée par l'investigation systématique et aussi complète que possible des cas individuels». FORMATION DES PSYCHOLOGUES CLINICIENS En France, les psychologues cliniciens sont formés à l'Université et sont titulaires d'un Master 2 ou d'un D.E.S.S. de psychologie clinique et psychopathologie. Certaines formations universitaires suivent le modèle scientifique-professionnel (scientist-practitioner model) de formation des psychologues cliniciens qui a été créé en 1949 lors de la Conférence de Boulder, au Colorado. L'établissement de ce modèle de formation a fait suite à la réunion en 1947 d'une commission de l'American Psychological Association (APA) dont le but était d'examiner les programmes de formation et de recherche en psychologie clinique. Ce modèle scientifique professionnel dit "de Boulder" permet de rationaliser et de rendre plus scientifique le travail des psychologues cliniciens. |
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